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son travail ecrits qui viennent de paraître conférences, interventions le café philo historique présentation qui fait quoi ? cafés philo > 1998 cafés philo > 1999 colloque d’apt 1998 colloque d’apt 1999 contactez-nous actualités, évènements, … le commun, publié le 3 mai 2017 | par philippe le commun sans communauté ? sfax, avril 2017, texte l’interrogation sur le commun, à laquelle nous sommes invités aujourd’hui, a lieu dans un monde qui est dit le monde de la mondialisation. ce monde de la mondialisation est unique, sans autre, il a tout balayé sur son passage, soit toutes les autres formes de commun, de communauté sociales et politiques qui l’ont précédé : la communauté du communisme primitif, la communauté antique sous la forme de la belle et vivante « totalité éthique » grecque selon la lecture géniale qu’en donne le jeune hegel, les premières communauté chrétiennes dans la communion avec le christ, la société féodale articulé autour de la foi et du service au seigneur terrestre et céleste, les républiques laïques constitutionnelles nationales, ainsi que des appartenances aussi traditionnelles que celles au pays, à la région, la nation, la famille même, toutes ces formes sociales d’appartenance en commun se trouvent noyées dans les flux de la mondialisation. il ne reste que des individus libres dans un individualisme de masse. ces anciennes formes de communautés, quelles que soient nos nostalgies, se sont enfuies, elles ne reviendront plus jamais, laissant l’individu de masse seul, solitaire. mon intervention, avant de tirer des conséquences de cette nouvelle situation contemporaine quant à la vie politique et à la communauté, va d’abord demander : qu’est-ce qui est impliqué dans la mondialisation quant à la nature et l’être du commun ? i– commun de commerce et de communication le seul commun qu’on trouve est celui qui est dans le commer-ce et dans la communi-cation. faire du commun, c’est d’abord laisser passer, sans frontières, sans taxe, sans obstacle, interdits, sauf urgence, exception. tel est le mot d’ordre de notre monde mondialisé. la mondialisation revient, quant à son sens, à l’expansion illimitée de l’équivalence générale des biens, des produits, dans un circuit d’échange indéfini qui est sans destination. le circuit d’échange, le marché, se reproduit et s’exalte de lui-même, indéfiniment et totalement. indéfiniment, car sans limite et totalement car tout s’échange contre tout. l’intermédiaire qui permet cet échange totale et indéfini, généralisé, c’est l’argent comme équivalent général, le concept existant là, l’universel, de fait. que nous en ayons beaucoup ou pas beaucoup d’argent, le seul commun que nous ayons aujourd’hui c’est l’argent. les sociétés occidentales, et surtout l’europe — et il faudrait que sur ce point elle ne soit pas un modèle pour les autres — ont abandonné le politique, elles l’ont soumis à l’économique, au marché. l’europe n’est plus qu’un gros marché commun. le common market est un supermarket, et seulement cela. ladite « communauté européenne », malgré les dénominations officielles, est un gros marché dont la communauté politique et véritable est complétement absente. conséquence : ce qui caractérise le commun, du monde d’aujourd’hui réduit au commun de l’échange, est qu’il est pris dans un processus d’éradication des communautés traditionnelles, jugées archaïques et les tentatives de les faire revivre, jugées réactionnaires. voyons maintenant le caractère de ce commun. ii – le commun : l’argent premier caractère : le commun de l’échange aujourd’hui passe par la monnaie, c’est l’argent qui rend commun deux produits différents, hétérogènes. la monnaie est une manière d’exprimer leur valeur commune. ce que les objets ont en commun c’est de valoir tant de dirhams, euros, dollars. deuxième caractère : ce commun est un universel abstrait. une paire de chaussures est différente d’une douzaine d’œufs de poules, mais ce que ces choses qualitativement différenciées ont en commun, c’est leur prix : les chaussures valent quatre douzaines d’œufs. elles sont convertibles substituables, égales entre elles, grâce à l’argent. l’argent rend commun car il est le convertisseur général, universel de la qualité en quantité. les différences sont donc neutralisées, suspendues dans l’égalité abstraite de la valeur commune. plus exactement les produits qualitativement différenciés sont subsumés, rangées sous leur valeur en argent, leur prix, ils sont convertis en une quantité de monnaie déterminée et commune, qui les mesure abstraitement. l’argent comme équivalent général constitue donc un universel abstrait, coupé ou séparé des choses concrètes avec leur formes, matières, qualités et fonctions (leur valeur d’échange a supplanté et éliminé leur valeur d’usage). troisième caractère : extension universelle à tous les domaines du régime d’équivalence générale. ce qui arrive aux produits arrive aussi aux messages et aux messagers. tout est donc échangeable ou peut le devenir. tout est marchandise ou marchands. l’état et le droit servent tout au plus d’armature et se réduisent à assurer les conditions de l’échangeabilité universelle, du marché mondial. tous « citoyens du monde » : ce slogan implique que ces « citoyens » virtuellement sans état national, ni mondial ne sont que des marchands, des échangeurs, qui n’ont pas vocation à s’attacher à un contenu ou pays déterminé, mais à faire circuler dans le circuit ou les réseaux mondiaux de communication. ils sont « arrachés » à leurs particularités. telle est l’émancipation : être le plus possible affranchi de toutes détermination d’ethnie, de culture, de religion, de nation, de langues… la communauté mondiale dite « libre », formée par le commerce et l’argent est donc une communauté détachée, séparée du monde social effectif, sans substance, sans contenu déterminé et pouvant ou devant accueillir n’importe lequel. la libre circulation des biens, des messages et des messagers devient notre seul véritable commun. iii – le saccage écologique célérité, fluidité, ouverture sans frontières et sans taxes des marchandises et des personnes, liberté d’échanger et de circuler, délivrance vis-à-vis des traditions : tel est le côté émancipatoire, voyant et apprécié de la mondialisation marchande, ce qui lui permet pour un temps encore de se maintenir. mais, comme nous le savons tous par ailleurs, nous constatons que la puissance d’échanger, pour elle-même, qui ne connaît pas d’autre raison ou fin, est dévastation de la terre et ravage de toutes les cultures. l’universel abstrait se fait négativité et se retourne cruellement à l’égard de la réalité. le commun du commerce est sans passé. il fait table rase des traditions, elles sont trop lourdes à porter dans le voyage commercial, dans l’échangisme rapide et effréné qui est la loi de ce monde. les cultures déterminées, d’aides, de ressources, d’équipements potentiels, sont devenus des empêchements. les cultures particulières — et les cultures sont toujours particulières — sont donc neutralisée, arasées virtuellement. de même la planète, ses matières premières, ses équilibres immémoriaux, la diversité de ses espèces vivantes sont saccagés par la dévastation technique, par ce que heidegger appelait le gestell, puisque finalement il ne s’agit de produire que pour échanger, échanger pour échanger, volonté de volonté. mais il y a peut–être pire que ces atteintes écologiques. les qualités positives, appréciées, de la mondialisation — la liberté et la fluidité de la circulation ses biens et des personnes, la communicabilité , la délivrance vis-à-vis des traditions et des églises, ouvertures des frontières , bref ce qu’on appelle l’« émancipation » ont pour envers un lourd inconvénient, autre que les dégâts écologiques. car, après tout, ces graves atteintes peuvent être corrigées par une ferme résolution politique et par un surcroit de développement technique. quel peut être ce pire dont je viens de parler, pire que la dévastation écologique ? le commun du